Auguste Villiers de L'Isle-Adam

Publié le par Eric Balay

L'EVE FUTURE

écrit par Auguste Villiers de L'Isle-Adam publié en 1886


BIOGRAPHIE :


AUGUSTE VILLIERS DE L'ISLE-ADAM (Saint-Brieuc 1838 - Paris 1889) mort à 51 ans. Descendant d'une ancienne famille dont la condition était devenue très modeste, il se croyait destiné à produire une oeuvre capable de rénover la pensée littéraire. Influencé par Baudelaire et par Edgar Poe, il donna d abord des recueils de vers romantiques (Premières. Poésies, 1859) , avant d'exprimer son idéalisme mystique dans un roman intitulé Isis écrit en 1862 et une série de drames Le Nouveau Monde écrit en 1875. Ami de Mallarmé, il ne fit cependant pas partie du mouvement symboliste. II traduisit dans ses derniers contes son désir absolu et son dégoût de la vulgarité quotidienne (Contes cruels écrit en 1883, l'Amour suprême écrit en 1886, Tribulat Bonhomet écrit en 1887, Histoires insolites écrit en 1888 et Les nouveaux Contes cruels écrit en 1888.


Aprés sa mort parut le grand drame qui l'avait hanté toute sa vie Axel (écrit en 1872) et publié entre 1885 et 1890. Récemment on a publié de lui sa Correspondance en 1962 et un drame inédit, Le Prétendant en 1965.




PROLOGUE :


L'auteur crée un monde fabuleux où les inventions les plus récentes paraissent déjà habituelles. Pour la plus banale, le phonographe, elle avait, depuis sa conception par Charles Gros en 1 877 et sa réalisation par Thomas Edison la même année, moins de dix ans d'existence lorsque le roman fut publié. Cependant, à l'encontre de Jules Verne, son contemporain, Villiers n'affiche pas une grande fascination pour ces découvertes, qui provoque chez lui une certaine ironie. Le livre est dédié "aux rêveurs et aux railleurs".

Le roman devait inspirer Fritz Lang (Vienne 1890 - Los Angeles 1976) mort à 86 ans,et sa scénariste Théa Von Harbou avec le fameux film Métropolis réalisé en 1927.




RÉSUMÉ DE L'OEUVRE :

Le légendaire inventeur du phonographe, Thomas Edison (Milan, Ohio 1847 - West Orange 1931), mort à 84 ans, vit à l'écart dans un antre new-yorkais. Son jeune ami, Lord Ewald, lui annonce sa visite. Il vient lui confier une étonnante peine amoureuse : furieusement épris d'une femme des plus belles, Alicia, il souffre de ce qu'une imperfection, à d'autres inapparente, entache définitivement son amour. Après s'être assuré que Lord Ewald est effectivement déçu par ce que seul un amoureux raffiné et authentique pouvait percevoir et déplorer chez une femme, Edison lui fait la plus surprenante proposition : une Andréïde de sa conception, à la ressemblance parfaite d'Alicia, mais qui serait absolument belle (le fortuit qui dessert celle-ci est éliminé). Lord Ewald est bien sur incrédule, mais Edison lui découvre qu'il a déjà réalisé une telle créature. Il lui décrit avec précision tous les merveilleux mécanismes, reproduisant à la perfection les gestes, les attitudes, les paroles, la présence d'une femme, mécanismes toujours occultés enfin de compte sous la carnation idéale de l'Andréïde ainsi animée. Bientôt séduit, Lord Ewald s'enthousiasme pour cette créature, qu'il veut ramener avec lui en Angleterre avant de se séparer d'Alicia.




COMMENTAIRE DE L'OEUVRE :

Seul l'univers, assez fantaisiste, de Villiers pouvait donner naissance à un tel rêve. Au songe d'un amoureux, l'Américain Edison apporte les moyens tecnniques, qu en d'autres circonstances on se passerait de connaître, de sa réalisation parce que, malgré la sience ou à cause d'elle, il a du pousser très loin la recherche d'une femme ou d'un amour. Ses stupéfiantes explications mécanistes horrifient mais séduisent également et poursuivent un idéal entrevu. Car si les interlocuteurs, sont, somme toute, des amoureux irréductibles, ils sont surtout des artistes. L'évocation de leur délicate déception amoureuse, celle de la conception et de la possibilité romanesque de cette Eve future, suscite une créature possédant toutes les qualités humaines, puisqu'elle répond à chaque instant à leur volonté de perfection. Cette Eve serait aussi bien un poème ou le roman même de Villiers.



EXTRAITS DE L'OEUVRE


Guérir grâce à la science


... J'ai peut-être un moyen de vous guérir ou, tout du moins de...

- Hélas ! impossible !... dit lord Ewald avec un sourire amer. La science ne saurait aller jusque-là.

- La science ? - Je suis celui qui ne sait rien, qui devine parfois, qui trouve souvent, qui étonne toujours.

- D'ailleurs l'amour dont je souffre est d'un ordre qui ne saurait sembler qu'étrange et inconcevable.

- Tant mieux ! tant mieux !... dit Edison en ouvrant de plus en plus les yeux. Donnez-moi, seulement quelques détails !



La promesse d'Edison

Après une minute de stupéfaction :

- Mais une telle créature ne serait jamais qu'une poupée insensible et sans intelligence ! s'écria-t-il, pour dire quelque chose.

- Milord, répondit gravement Edison, je vous le jure : prenez garde qu'en la juxtaposant à son modèle et en les écoutant toutes deux, ce ne soit la vivante qui vous semble la poupée. Laissons cela, dit-il. La conception est accablante : l'œuvre sentira toujours la machine ! Allons ! vous ne procréerez pas une femme ! Et je me demande, en vous écoutant, si le génie...


 


Une femme multiple comme les rêves

- Vous voyez, pour conclure, que Hadaly (la première Andréide) est tout d'abord une souveraine machine à visions, presque une créature, une simillitude éblouissante. Les défauts que je lui ai laissés, par politesse pour l'Humanité, consistent seulement en ce qu'il y a plusieurs genres de femmes en elle, comme si toutes les vivantes (on peut les effacer). Elle est multiple, enfin, comme le monde des rêves. Mais le type suprême qui domine ces visions, Hadaly seule, est, si j'ose le dire, parfaite. Les autres, elle les joue : c'est une merveilleuse comédienne, douée, croyez-moi, d'un talent plus homogène, plus sûr, et bien autrement sérieux que Miss Alicia...

Publié dans litterature.rebelle

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