Loti, Pierre

Publié le par Eric Balay

PECHEUR D 'ISLANDE

écrit par Pierre Loti et publié en 1886

BIOGRAPHIE :

PIERRE LOTI (Rochefort 1850 - Hendaye 1923 ), mort à 73 ans, fut officier de marine. Il parcourut les îles de l'Océanie, l'Afrique et le Tonkin. Il écrivit dans un style impressionniste une série de romans baignés dans l'atmosphère du désenchantement : Le Mariage de Loti écrit en 1882, Mon Frère Yves écrit en 1883, Pécheur d'Islande écrit en 1886, Monsieur Chrysanthème écrit en 1887, Ramuntcho écrit en 1897 et Les Désenchantées écrit en 1906. Il entra à l'Académie française en 1891.

PROLOGUE :

Lorsque Pierre Loti publie cette œuvre, best-seller de l'époque, il partage son existence entre sa carrière d'officier de marine, grâce à laquelle il voyage beaucoup, et son activité littéraire.

RÉSUMÉ DE L'OEUVRE :

Yann et Sylvestre, ainsi insépérables, quittent chaque été leur Bretagne pour aller pêcher au large des côtes d'Islande. Yann, marîn secret et taciturne, aime sans se déclarer Gaud, cousine de Sylvestre. Celui-ci, désigné pour partir combattre au Tonkin; y est gravement blessé et meurt sur le bateau du retour, Yann ose enfin demander la main de Gaud et l'épouse. Six jours après les noces, il reprend la mer pour l'Islande. Gaud attendra en vain le retour de son mari, disparu dans les eaux glacées.

COMMENTAIRE DE L'OEUVRE :

Dans cette œuvre, Loti délaisse les contrées exotiques (Polynésie, Afrique et Extrême-Orient) qui ont largement contribué à sa gloire littéraire pour se concentrer sur ce qu'il connaît le mieux : la mer. Elle occupe la plus grande partie du livre et ne laisse une petite place aux personnages de chair et d'os que pour mieux les engloutir. Yann, Sylvestre et Gaud sont en quelque sorte des esquisses : Loti ne s'étend guère sur leur description physique et n'évoque jamais leurs pensées. Ce sont en effet des stéréotypes. Ils nous resteraient étrangers si un destin tragique et implacable ne frappait ces personnages, ne les rendait terriblement humains. Pour l'auteur, on ne peut lutter ni contre la mort ni contre la mer. Yann et Sylvestre meurent en mer et l'auteur signe alors les plus belles pages du livre. Elles frappent l'imagination par des descriptions sublimes et prenantes, d'une grande originalité. Une angoisse profonde imprègne les atmosphères de ce roman et les personnages sont plongés dans une solitude définitive qui ne s'achève que par la mort. Tout le livre est rempli d'une infinie résignation et le plus remarquable est la pudeur avec laquelle l'auteur raconte ces événements si sombres et la sobriété des sentiments de ses personnages : on trouve ici une objectivité qui fait refuser à l'auteur le sentimental, et même la pitié. Il présente simplement l'histoire en laissant le lecteur juger. Tout cela fait de ce roman une livre totalement à part, qui résiste bien au temps.

EXTRAITS DE L'OEUVRE :

La mer, omniprésente ...

La Marie projetait sur l'étendue une ombre qui était très longue comme le soir, et qui paraissait verte, au milieu de ces surfaces polies reflétant les blancheurs du ciel; alors, dans toute cette partie ombrée qui ne miroitait pas, on pouvait distinguer par transparence tout ce qui se passait sous l'eau (...)

Le soleil, déjà bas, s'abaissait encore; donc c'était le soir décidément. A mesure qu'il descendait dans les zones couleur de plomb qui avoisinaient la mer, il devenait jaune, et son cercle se dessinait plus net, plus réel. On pouvait le fixer avec les yeux, comme on fait pour la lune. Il éclairait pourtant; mais on eut dit qu'il n'était pas du tout loin dans l'espace; il semblait qu'en allant, avec un navire, seulement jusqu'au bout de l'horizon, on eut rencontré là ce gros ballon triste, flottant dans l'air à quelques mètres au-dessus des eaux.

Les noces avec la mer

Une nuit d'août, là-bas, au large de la sombre Islande, au milieu d'un grand bruit de fureur, avaient été célébrées ses noces avec la mer.

Avec la mer, qui avait été autrefois aussi sa nourrice; c'était elle qui l'avait bercé, qui l'avait fait adolescent large et fort (...)

Lui, se souvenant de Gaud, sa femme de chair, s'était défendu, dans une lutte de géant, contre cette épousée de tombeau. Jusqu'au moment où il s'était abandonné, les bras ouverts pour la recevoir, avec un grand cri profond comme un taureau qui râle, la bouche déjà emplie d'eau, les bras ouverts, étendus et raidis pour jamais.


Publié dans litterature.rebelle

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